L’INDUSTRIE DRAPIERE
Clermont a toujours été une cité dynamique qui ne s’est pas contentée du prestige apporté par ses illustres personnages. Ce dynamisme s’est surtout manifesté par une disposition exceptionnelle à s’adapter aux vicissitudes diverses contraignantes mais néanmoins surmontées. La plaine qui s’étale au pied des avants monts qui font à Clermont une ceinture de collines boisées ou caillouteuses formant un délicat vallon, ne pouvait que prédisposer à une production agricole naturelle. Mais une autre particularité géographique a inspiré l’ingéniosité des Clermontais pour en tirer parti, c’était le fait que les routes importantes du Bas-Languedoc se croisaient sur son territoire au point d’en faire un carrefour important, une aire de repos avant d’attaquer les rudes côtes du Larzac, de l’Escandorgue et de la Montagne Noire. Les romains, fameux pionniers et aménageurs y établirent naturellement le croisement de leurs célèbres routes,encore visibles aujourd’hui. On en trouve des preuves dans les vieux chemins dits » de Clermont » jusque dans la vallée de l’Orb,chemin de St Gervais à Clermont, Chemin de la Vacquerie à Clermont.
Un ancien pont romain est appelé « Camin ferrat de Clermont ». Aniane à son terroir du « Clermountès » Des chemins de Clermont traversaient Alignan du Vent et Bélarga. Les Clermontais industrieux , comme pas un, pour profiter de tous ces visiteurs organisèrent naturellement leur accueil et surtout un marché qui devint bientôt le plus important du Midi ( après celui de BEAUCAIRE) En 1140 il est déja cité dans le Cartulaire de GELLONE, en 1283 il est fréquenté par tout le Rouergue, pour la vente du bétail, gros et menu, MONTPELLIER, PEZENAS, AGDE, BEZIERS,NARBONNE y accourent comme » au magasin et à la nourrice de tout le pays ». C’était déjà le Mercredi, on y vendait, bois, laines fers,pourceaux, oignons, herbes potagères,charbon et même du pain acheté par les Clermontais qui n’ayant pas le droit d’en acheter ailleurs qu’à Clermont profitaient de son prix plus bas. En 1827 s’institua un marché supplémentaire le Lundi, plus 4 foires par an, les premiers Lundi de Janvier; Avril, Juillet et Octobre,plus une Foire au Moyen Age pour la St Brice le 13 Novembre et qui durait quatre jours. Les Clermontais profitèrent immédiatement de ce lieu de négoce pour commercialiser leur production agricole, ce fut tout d’abord les Olives et l’Huile d’Olive, en 1598 les Oliviers occupaient 1705 seterés (420 hect.) pour 393 seterés de vignes (97 h) en 1744 les moulins à huile vendaient 2/3 de leur production, en 1341 ,première mention de production artisanale Drap, Tanneries, poteries.
Le Drap Clermontais: richesse économique
La célèbre transaction des Consuls Clermontais avec le Seigneur de Clermont en 1341 indique la présence de fabricants de draps à Clermont, il est probable qu’a l’image de Lodève elle ait eu une existence nettement antérieure, comme à Lodève, ou en 1161 s’organisa une fabrication importante grâce à l’introduction par Bernard GUI d’un procédé de teinture écarlate à base d’une petite graine. Quoi qu’il en soit, l’industrie du drap très importante à Lodève l’était également à Clermont et Villeneuvette,dont le territoire appartenait à Clermont avant qu’il ne fut donné à la célèbre manufacture Royale. En 1341, deux agents de Police étaient chargés de vérifier les fabrications textiles et de signaler les malfaçons au Seigneur.
La fabrication Clermontaise était excellente car les eaux du Rhonel permettaient un lavage et une teinture de qualité. On employa tout d’abord des laines d’Espagne,très fines,qui permirent de fabriquer des produits équivalant à la qualité anglaise , d’ou le nom de Londrins donné à cette fabrication. Par la suite on diversifia la fabrication en utilisant des laines du Larzac (Longues rouvieres) et celles des troupeaux des Ruffes (très grossières,les plus utilisées étaient celles du Bitterois.) Les fabrications étaient essentiellement artisanales, qui occupèrent de nombreux façonniers à domicile travaillant pour des Maitre-faconniers qui les payaient à la pièce.
Professions directes ou indirectes
Tondeurs: Coupe des poils d’une manière égale
Cardeur: démêle les fibres textiles,les isole,les nettoie.
Blanchers ou blanchisseuses: effectuent le blanchissage de la toile
Affineurs: finisseurs avec des étoffes pliées en zigzags, disposée sous presse
Tisserand: Fabrique des tissus sur métiers.(Moyenne 15 pièces par an)
Pareur: Encollage des draps.
Ces travailleurs à domicile se louaient chaque année à la foire pour une période allant de la « Semence à la moisson », d’autres travaillaient pour la Manufacture Royale de Villeneuvette, ils étaient parfois débauchés par des Maitre-Faconniers, ce qui amenait des litiges juridiques car Villeneuvette bénéficiait d’un privilège royal. En 1737 ce privilège fut entamé car à la suite de multiples réclamations les façonniers Clermontais obtinrent le droit de vendre directement leur production au LEVANT et de ne plus passer par leurs courtiers de MARSEILLE. En 1738 Cinq fabricants s’installèrent dans une fabrique avec un espace garni de Rames( étendoirs permettant un meilleur contrôle qualitatif) ils avaient comme noms Antoine RAISSAC, Jean PELLATAN ,Jean BERNARD, Pierre MARTIN, Pierre DESALASC. Dans leurs fabriques intervinrent des ouvriers spécialisés payés à la journée.
Brassiers ou trameurs: qui préparent et disposent les fils de trame
Retoucheurs de Drap
Appreteurs ou Maitre-Tisserand
Fouloniers: Foulage des draps
Trieuses de laines ou » Epotoyeuses »
Equarisseurs: Disposant les Rames
EMPLOIS INDIRECTS
Muletiers ou mulatiers: fabricants de cardes
Menuisiers:Fabricants de peignes pour les Métiers à tisser
Rémouleurs: Aiguiseurs de ciseaux pour tondre sur meules de pierre de ST PRIVAT
Savonniers: Fabrique de savon liquide pour fouler les draps (1747 à CLERMONT 19448Kgs)
Teinturiers: Garance et Pastel. Spécialité des Dominicains (source dans leur enclos)
Grossistes en laine
Fabrications diverses : Etoffes: Sargue ( Bandes de faible largeur,grise,rousse ou blanche pour robes.
Etamine, burat,Serge : JUPES: essentiellement en cadis (étoffe de laine blanche) utilisés également pour veste et culotte de soldat. CHAUSSETTES: Serge blanche ou cadis gris. BAS: Laine et coton (en 1745 un seul fabricant) AUTOUR DU COU: mouchoirs en soie ou en mousseline.
CONTROLE DES FABRICATIONS
Les consuls (Maire de l’époque) désignaient deux visiteurs(ou inspecteurs), qui surveillaient les produits fabriqués.Les fabricants de draps se regroupaient dans une Confrérie appelée « de St PIERRE et st PAUL siège Eglise st PAUL, pour la fête de la ST PAUL ,ils assuraient une large distribution de pain aux pauvre. Les Tisserands étaient regroupés dans la confrérie de ST FABIEN et ST SEBASTIEN. Les autres professions, dans la confrérie de la TRINITE.
AUTRES FABRICATIONS TEXTILE
LISIERE: bordure de tissu différent limitant une pièce de drap
SOIE : Filateurs, il y avait à CLERMONT en 1751 4 Tours pour filer
TOILE DE GENET TEINTURIERS: (en garance ou pastel)Spécialité des Dominicains
LIMOUSINE : et TAPIS : Ce nom assez méconnu est celui donné aux pèlerines de Berger Clermont était spécialisé dans cette fabrication, grâce aux dessins qui les agrémentait.
CHAPEAUX ( Fabricants)En 1745 24 Chapeliers(3000 douzaines de chapeaux, exportation Antilles’
Ceux qui ont animé l’industrie du textile
Le premier nom retrouvé dans nos documents est celui de FABRE Jean Tondeur de drap.
En 1655 VIRENQUE Jean Fabricant de tissus dit « de NIMES ».
1678 : Fabricants de drap: PRADIER Mathieu, SUQUET Fulcran, VIGUIER André Tondeur RECORD Jean Brassier, SARTRE Marc et Raymond Savonniers.BAUMES Jacques Blanchisseur BOURDEL Barthelemy Tondeur, LAUX cardeur,CROS Antoine Savonnier,OUILLIER Pierre Mulatier, SALASC Jean et BAILLE Pierre Fabricants Ce dernier avait en 1673 avait acheté un moulin à foulon à La Dourbie et devint le premier propriétaire de VILLENOUVETTE
En 1675 mais il agissait comme prête-nom d’un groupe de financiers qui l’évincèrent en 1676.
1680 ARNHIAC est signalé comme expert.
1692 PELLATAN Gabriel Fabricant 1725 JALMES Pierre fabricant à CLERMONT fonde l’importante usine de LA PLANQUE qui utilise la force hydraulique d’une retenue sur la LERGUE. Il s’y fabriquait des draps pour le marché protégé du Levant.Cette usine succédait à un ancien moulin à eau.
En 1748 il s’y fabriquait 12 ballots de « Londrins « (soit un total de 120 pieces) (Cette usine fonctionna jusqu’en 1948 comme filature de laines peignées, puis devint usine de sardines aujourd’hui elle abrite des diverses activités.)
1725 à 1729: Une très grosse progression de Fabricants,on note: DE SALASC,FLOTTES Raymond,PELLATAN,CLAPARES,BONNEVILLE,PRADIER Mathieu,VERNAZOBRES,LIQUIER Jean BOUISSON,TUDESQ,VERNY Gabriel ,VILLET,ASTRUC,ROUSTAN Jean, TOUCAS Antoine, BERTHOMIEU Antoine,, comme Drapiers BERNARD et RAISSAC,MARCHANDS: FALGUIERE à Cadix, et J.P. MESSIER à Marseille, Banquiers à Paris: Etienne LANDIE et Jacques GALTIE1746 / Drapier CATHALA, Fabricants: FRAISSE,MARTIN Pierre, TOUCAS Antoine BOURLAT Directeur de la manufacture Royale de CLERMONT, Inspecteur: DELAGENIERE et TRICOU.
1761 GOUSTY françois HERAIL Louis, MARTIN Pierre et Jean Fabricants, apparaît alors Mr DELPON capitaine reformé qui obtient l’autorisation de s’installer comme fabricant et qui par la suite s’associa avec LUGAGNE ( fabricant en 1725) leurs descendants créèrent la banque à leur nom associés, aujourd’hui le Credit Lyonnais) M. DELPON et Mr Albert BRUGUIERE s’associèrent pour créer une nouvelle fabrique bordée par la Rue Frégere et le lit du Rhonel, les anciens bâtiments abritent aujourd’hui la S.O.C.A.H DELPON et BRUGUIERE ont cessé leur activité en I93O après avoir employé plus de 100 employés En 1788, une crise importante fut provoquée par la fermeture du marché espagnol, la concurrence britannique et celle des fabricants du Nord (mieux outillés) qui s’ajoutait à la perte du marché du Levant.
1840 PLANQUE,SIAU (220 emplois)DELPON, FONTENILLE,BRINGUIER,BOISSIERE Fréres 280 emplois) PORTES Louis (125 emplois) BERTRAND Pierre (120 emplois) PORTES Fils (43 emplois) DELOBEAU fils (41 emplois) SIAU,SALASC (130 emplois) LUGAGNE-DELPON (115 emplois) ANINAT Pierre (115 emplois) PLANQUE Antoine (IOO emplois) ROGER et CREMIEUX(lisieres et limousines 210 emplois) CASTELBON et RONZIER JOLY(49 emplois BELLOC (Filatures laines 5O emplois) 1854 Fabricants: ANINAT Fréres et Pierre, BOISSIERE Fréres,DELPON et Cie, LUGAGNE et SAUMADE,MAREAU et DEVEAUX,PORTES, PORTES Cadet, ROUQUET Laines: ORTUSet L.SAUMADE,fabricants de Lisiere: CREMIEUX fréres,MARQUEZ et GEBELIN,ROGER,ORTUS.
Teintureries: BELOUS,DELPON,DEJEAN,MARQUEZ 1878 : Manufactures: ROUQUET et Cie, Vve BRUGUIERE, et BOISSIERE ,MARQUEZ Victor,PORTES L,ROGER Jeune et fils, MAREAU et DEVAUX.1896: Manufactures: ROUQUET, BRUGUIERE et BOISSIERE Laines: FARGUES- L.BALESTRIER SAUMADE,ROGER N. I878 Limousine et tapis: COT et BALP; ( Le Moulin de Cot Route de Lacoste)ROGER, MARQUES (Eugéne) et GIBELIN.(45 emplois)
Il y avait 14 métiers,on y fabriquait des couvertures (bleues et kakies) Les machines servaient à:
le Mercier pour nouer les fils,puis on y passait les nattes
Le Saxon, utilisé par les plus agées, avec navettes grillées, pour fabriquer du drap rouge officier (celui des Piou-pious)
Le Belge: petits métiers à navettes(dans la grande salle)pour draps de commerces avec trames.
L’Anglais: gros métier – travail très pénible dans une salle spéciale A l’entresol il y avait 10 métiers. Le travail était pénible et payé au forfait, on parvenait à gagner 50 frs par semaine. Pendant le mois de Marie(en Mai) on arrêtait à 16h, on buvait le café et on priait devant la Statue de la Vierge. Les patrons étaient très chrétiens(à l’image de ceux de VILLENEUVETTE Mr JOSEPH et Mr DELPON Mr Albert BRUGUIERE Directeur Mr BONJEAN. Horaires 6 à 12 H et 13 à 18h (la journée 18 sous pour 11 h ou 3 sous le mètre) .
Article de Blaise Gallego, corrections avril 2019 p hernandez