LES ANCIENS PETITS METIERS
Los Pichots trabalhs – Les petits travaux
Certains contemporains se souviennent encore de ces petits travaux qui animaient les «carrières» ou rues. Nos souvenirs sont hantés de tous ces bruits, de ces appels, qui animaient notre petite cité et qui nous rendaient tous solidaires, car chacun sortait de sa maison à ces différents appels, s’attroupait autour de celui qui venait proposer ses services, ou se déplaçait pour voir ces artisans à l’œuvre, dans la rue ou dans leur échoppe.
La rue était le Salon où l’on cause, le lieu de rencontre privilégié et c’est ainsi que chacun était au courant de ce qui se passait chez son voisin. Cela facilitait les contacts mais surtout encourageait les uns et les autres à s’entraider, à assister les personnes en difficulté, les malades, les deuils, les malheurs étaient partagés par les voisins.
Le Tondeur de chiens : la plupart étaient des gitans. Il attirait les clients avec le claquement de ses ciseaux, il récupérait, en sus des «sous» de sa prestation, les poils enlevés et nous ignorions à quoi cela servait.
Lou Cardaire (Le cardeur) : Le dernier en exercice fut M. Marragou qui exerçait à domicile (Plan Mignon) mais il y avait l’ambulant, sur un drap appelé Linceul ou sale, il étendait la laine défraîchie après avoir ouvert le matelas, puis sur son chevalet, il actionnait le cardage par un mouvement de va et vient qui redonnait de la souplesse et supprimait les «les bourres» qui durcissaient le matelas.
L’escoubilhaire (Le Boueux) :11 y avait peu d’ordures, bien des choses étaient récupérées d’une façon ou d’une autre, les emballages étaient rarissimes, car on achetait pratiquement tout en vrac, les sachets en papier étaient récupérés pour allumer le feu, les os étaient donnés aux chiens, muni de sa pelle et de son balai il chargeait son chariot .
Lou peilharot (Le chiffonnier) : qui achetait les peaux de lapin ou de lièvre. Il criait «Péls de lèbres, pels de lapins! À cinq sous la pélha blanca, a mai la car i séguia dédins» «Peaux de lièvres, peaux de lapins, à cinq sous la peau blanche, même Si la chair y soit dedans».
L’estamaîre (l’étameur de casseroles ou ustensiles de cuisine) :Il criait «E.. .stamà». Le dernier à Clermont fut Mr Senatore (surnomé Pichoumille) . Il avait son atelier place j.Balestier, mais opérait devant la porte de sa remise, au grand ébahissement des gamins, spectateurs attentifs de son adresse manuelle.
Lou pégaire ou Pégot (leur cri « Fer semelà souihês ») (Savetier ou cordonnier) : Ce surnom leur avait été attribué en raison de la poix utilisée pour coller les tiges et les semelles car en plus du ressemelage, ils étaient «cordonniers» c’est à dire qu’ils confectionnaient des souliers. Parfois, ils passaient dans les rues pour proposer leurs services. Leurs échoppes étaient aussi un lieu de rencontre et là encore les enfants les observaient dans leurs travaux, ils étaient étonnés de voir l’artisan emplir sa bouche de petits clous (semence), ce qui lui permettait de les utiliser sans perte de temps mais qui ne l’empêchait aucunement de converser .
Lou pescaîre (le pécheur) : Son cri «Fénnas, ai pèy de l’Erga», «Femmes, poissons de Lergue». Un des derniers était Mr Granier, qui allait les pêcher, souvent à la nage. Les saisissant parfois avec les dents, c’était un grand gaillard au physique impressionnant.
La marchande d’lrônihe (d’oranges) Qui criait «Coula la maîhorca, coulha !» «Coule la mayorquine, coule!» En effet nombreux étaient les marchands de fruits installés à Clermont originaires des îles Baléares (Planas ; Réal, Mayol, Fontz arrivés en 1889, ils furent l’avant-garde de ceux qui suivirent, dans les années 1914 à 1925, et ceux de 1936137, venus se réfugier après la guerre civile espagnole). Le seul marchand de fruits et légumes était Blas Requena, qui avec une charrette branchée, tirée par un mulet allait vendre dans les villages ou hameaux voisins annonçant sa venue à grands coups de corne.
La marchande d’herbes : Fénnas, cal vol d’hérbétas, cal ne vol (Femmes qui veut des Herbes potagères, qui en veut)
La porteuse de lach (La porteuse de lait) : Qui portait sur une petite carriole deux bidons de lait , pour servir des clients à domicile, avec une louche dans leur propre récipient, plus tard cette activité disparut et les gens allaient chercher le lait dans trois laiteries, avec leur étable à vaches (6 en moyenne), une dans la Rue Four de la Nation (Bruchet successeur de Galendo) Rue Frégère, Rivemale et l’autre Rue Bara, Casimir Reboul. Certains clients se plaignaient de l’éventualité d’un ajout d’eau défendu et prohibé et s’exclamaient «Fau laissa bu Iach, couma diéu la fach» (Il faut laisser le lait comme Dieu l’a fait). Elie et Anna Ginouvés, fondateurs d’une dynastie de commerçants en 1926, livraient du lait qui provenait d’une grande laiterie du Tarn, ainsi que Mr et Mme Besson (avec une charrette tirée par un mulet). Mais le succès progressif de leur vente sonna le glas des laiteries Clermontaises. Elles cessèrent leurs activités dans les années 1942.
Epicarié de carrière (Epiciers de rues. quartiers ou villages) (1): Il en subsiste un seul, Paul Planas, successeur de son père Antoine et de son grand-Père Michel (fruits et légumes) dynastie commerciale ayant débuté en 1889, il y avait dans les années 30 un ambulant en triporteur à la marque Caiffa qui muni d’une trompe attirait le chaland, il appâtait les enfants (et oui déjà) en offrant un journal en images.
(I) Un Clermontais voulant s’exprimer en fronçais s’exclame : Mon Fils il fait une rue, ayant confondu le mot «carriere en Languedocien» et le mot Français employé pour «faire carrière»
Ramonaire (Ramoneur) :Il en existe encore aujourd’hui qui viennent proposer leurs services mais ceux de cette époque étaient typiques vêtus de leur habit noir, leur haut de forme et munis de leur matériel.
Le réparateur de (plats de) porcelaine. faïence et parapluies (Réparciaire de porcelena. faienca. para ploja).
Le pistachier (Marchand de cacahuètes). :Il s’agissait des cacahuètes en coques, qu’on dénommait à tort «pistaches», le plus connu était désigné par «Blas le Pistachier» il commençait sa vente en déposant sur chaque table de café quelques «pistaches» pour inciter à la consommation, puis il passait pour prendre les commandes, le prix de vente était au verre plein, un verre à grosses alvéoles, qui paraissait volumineux à l’extérieur ce qui était avantageux pour le commerçant Malheureusement des gosses le suivaient et plongeaient leurs mains dans le coté arrière du panier Pour éviter ce fâcheux manque à gagner, il fit confectionner un couvercle grillagé qui protégeait le coté tentateur évitant ainsi «la fauche» (le vol). Les cacahuètes étaient grillées au four du boulanger (Matéo en l’occurrence). Les vendeurs continuèrent longtemps, tout au moins jusqu’en 1960 environ, les derniers à avoir exercé ce commerce furent :A. Roques,Vincente, Dolores, Manuelle.
Le vagabond, le chemineau : on ne disait pas mendiant, ni routard, sa particularité, il ne tendait pas la main, très poli, affable, le plus célèbre appelé «le légionnaire» connaissait les donateurs habituels et arrivait à intervalles réguliers, et chacun subvenait à ses besoins.
Lou marchand de mercarié Le marchand de mercerie ou le colporteur de porte en porte : Le plus connu était le «petit corse» il présentait sur son petit éventaire qu’il portait sur son ventre, des lacets, des cordonnets, des cartes d’épingles, des boutons, il avait à sa main gauche une longue pique avec deux barres transversales sur laquelle pendaient, des lacets, des rubans, qu’il vendait à la mesure, en l’occurrence «la cane» (vieille dénomination moyenâgeuse usitée avant que l’on imposât le système métrique) il criait «Tirez le bout, un sou la cane t tout le monde en aura ! tout le monde en prendra !»
Mais aussi combien de petites mains : brodeuses, repasseuses, stoppeuses, lessiveuse.. exerçaient ces petits métiers, honorables et néanmoins lucratifs?
Un autre «escoubilhaïre» était celui qui transportait les ordures, un autre transportait ce que l’on nomme aujourd’hui «des inertes» (pierres et gravats). Le dernier fut Mr Navarro qui avait son écurie Rue JJ Rousseau (salle St Paul), il les transportait sur sa carriole tirée par un âne et les déposait sur un terrain vague (ancien Tennis) prés des anciens abattoirs, route de Montpellier .
En août 1944, une armée allemande en déroute tentait, venant de l’Albigeois, de rejoindre les autres armées qui fuyaient par la Vallée du Rhône, ils avaient perdu bien des hommes et du matériel dans les escarmouches ou batailles provoquées par les groupes de résistants qui avaient comme consigne de retarder ou d’éliminer cette importante cohorte.
C’est ainsi que passant à Clermont ils pillèrent les habitants, recherchant surtout des moyens de transport qui leur faisaient défaut. Quatre soldats pénètrent dans l’écurie de l’infortuné Navarro, et lui prennent sa charrette et son âne, ses victuailles et du vin qu’ils goûtèrent abondamment, les voilà partis sur la route de Montpellier dans ce curieux attelage militaire, l’âne connaissant cette route ne manifestait aucune difficulté, mais lorsqu’il parvint au lieu de dépôt des gravats, il obliqua vers la droite et refusa d’aller plus loin. Les quatre soldats, bien imbibés s’efforcèrent de le faire avancer, mais rien n’y fit, et la mort dans l’âme, ils repartirent à pied.
Navarro, pendant ce temps, se morfondait, ayant vu partir son principal outil de travail et son compagnon de tous les jours. Il entend le bruit de la charrette et voit apparaître son bien le plus précieux, qui était revenu tout seul. Inutile de décrire qu’elle fut sa joie après avoir vécu autant d’émotion, et d’angoisse dans une journée à jamais mémorable.
Lou brulaïre de vin (Le bruleur de vin ou distillateur) Avant que n’apparaisse le gros matériel qu’installait M.Vernet dit Lou Brulaire (Grand père des frères Vernet, Paul etYvan) à la Fontaine des Pézouls (Pous), au bas de la Croix Rouge, existaient des «brûleurs» qui parcouraient les rues avec un appareil portable, et distillant sur le lieu même où l’on faisait le vin, caves particulières avec des pressoirs à bras et où on foulait les raisins pieds nus.
L’amoulaire (le rémouleur) :Il y a peu d’années que cette profession à disparu, mais les anciens métiers étaient bien plus rustiques que ceux que l’on pu connaître. On disait : L’amoulaire, sap pas faire bu mestié de courdonnié, la luzerna lé foi pena, la légna lé foi pou (Le rémouleur ne sait pas faire le métier de cordonniez; la luzerne lui porte peine, le bois (de chauffage) lui fait peur), il criait : Pourtas fous coutèls, cousinleiras (Portez les couteaux cuisinières).
L’escuraira La nettoyeuse de cuivres : Qui proposait dans les rues les plus huppées ses services ?
L’alumétaire : le marchand d’allumettes, bien entendu de contrebande et qui était vendues clandestinement au détriment de celles de la Régie officielle. Les vendeurs les fabriquaient à domicile, découpaient des petits bouts de bois que l’on trempait dans du phosphore, et vendus enroulés dans un petit papier (parfois mal façonnées elles s’enflammaient toutes ensemble).
Un alumétaire – Durand dit Champagne, on lui chantait « Champagne les fabriquent, la femme les emboîte, la fille les vend » Deux sous la boîte.
Le vendeur d’Almanach : Les almanachs étaient mensuels et donnaient bien de conseils, des prévisions atmosphériques, des horoscopes etc., la plupart étaient vendus par des infirmes au prix de 2 sous ;A Clermont c’était un boiteux du nom de RUL qui vendait l’almanach Pierre Larrivé, il s’écriait Larrivé vient d’arriver.
Textes, p Hernandez