CLERMONT L’HERAULT, UNE VILLE D’EAU
La ville de Clermont et ses alentours regorgent depuis des millénaires de sources dont la plupart n’existent plus de nos jours. Autour de Clermont on peut citer l’habitat Romain du supposé Forum Néronis ou les tènements de Peyre-Plantade et Le Canourgue (IO ha), L’Estagnol, le piémont de la Colline de Gorjan, St Peyre, Quintarié, Fouscaïs, La Madeleine, Le Devant de Ceyras, Les Clavelières , s’étendant sur une quarantaine d’hectares.Cet habitat, relativement important, confirmé par les anciennes et récentes découvertes archéologiques est manifestement appuyé sur un étang important (l’Estagnol), et la présence de nombreux puits, d’aqueducs souterrains sur une très grande superficie. Donc indéniablement basé sur la présence importante de points d’eau.
La ville actuelle est probablement une création des XI et XII aime siècle, mais en dehors de son adossement à la colline du Puech-Castel qui lui donnait l’avantage d’être une vigie parfaite abritée derrière de solides fortifications, c’est la présence de sources abondantes et surtout celle nommée « Fontaine de la Ville » qui fournissait de l’eau inépuisable et d’excellente qualité qui en a justifié l’emplacement.
Mais elle n’était pas l’unique point d’eau, loin de là, et l’énumération des lieux irrigués dans l’Histoire de Julien et dans les récits de Gaston Combarnous est édifiante par son nombre.
La description de la Fontaine du Centre Ville, première dénomination est assez étonnante lorsque on la compare avec la découverte très récente, après les fouilles du quartier du Pioch, de la vraie Fontaine de la ville, celle qui existait avant que l’on en fasse une nouvelle, quelques mètres en dessous.
Jugez-en : » D’une claire fontaine qui est de forme ronde, environnée de murailles naît une belle source d’eau que la nature pousse hors de la bouche de quatre lions de bronze, sans aqueduc, et en esté Eau cristalline en couleur, suave et douce au goust, tempérée en hiver rafraîchissante à ravir «
On note la présence de 26 belles fontaines arrangées le long du rond de sa circonférence, alimentées par la Fontaine de la Ville
Mais d’autres sources importantes sont signalées, la Source de la Frégére, la Source du Garel boiteux (ou Pelissière) route du Lac, la source du Sarac (route de Nébian) qui alimentait abondamment un ruisseau au Tènement de La Madeleine ( Grand Axe), les diverses sources sur le versant de La Ramasse, route de Nébian, (voir Villa des Sources), la source Belous qui alimentait l’usine de la Baryte (Équipement et pompiers), La Fontaine du Thourou, de Thou (Route de ND du Peyrou, Fontenay, découverte en 1842 par l’abbé Parameble).
Il faut y ajouter les sources secondaires, celles qui naissent dans le haut du lit du Rhonel. Mais parlons de l’importance des nappes aquifères, à peine à 2 ou 3 m de profondeur qui alimentaient les puits ; Rue Sans-Desbasses, Rue Michelet, Rue Croix Rouge, Rue Liberté, Rue Calquiéres, Rue Viala, Bd Gambetta etc.
Mais également le « fleuve » Clermontais, Le Rhônel (ou Ronel), qui permit l’installation d’industries drapières, tannerie, mégisserie, de chaux, lainières ; mais aussi le Rieu Périgne (Route de Lacoste) , Le Salagou, La Dourbie, les Ruisseaux de Cabrié, de l’Agassou, de la Grange Basse, l’Ariole, du Passant, de la Baume (ou de Lieuze) de la Grange, de Gabel (sarment en Français) Mas Villeneuvette, Tibaou (de Rougas à Rue des Jardins), des Bories et Fontchaude
NOTES :
Forum Néronis, emplacement d’une ville romaine contestée et que se sont disputés Clermont et Lodève (Lutevo) Clermont supposant que forum (marché en latin) s’applique bien à Claramontis Mercatorum (Clermont Marché) le plus ancien nom connu de Clermont, mais les opposants à cette dénomination en sont venus à considérer que l’emplacement de Peyre-Plantada (Pierre plantée ou Menhir) était un quartier de troupe (Grec N°93/98 Janvier 2000 – Dominique Garcia et Laurent Schneider).
L’Histoire du Chanoine Julien ( 1645) est fortement contestée sur le plan historique en raison de nombreuses affabulations sur les origines des Seigneurs ou sur leur importance sur un plan national. Mais les récits sur la ville, sur la commune et ses rapports avec les barons de Clermont sont incontestables et dignes d’intérêts pour la recherche historique.
Rafraîchissement en esté (été) par l’Eau de la Fontaine de la Ville –Les anciens se souviennent qu’en été on venait avec une cruche, ou un cruchon, prendre de l’eau fraîche, mais aussi récupérer les bouteilles de vins qu’on laissait plusieurs heures dans l’eau des « piles » (bassins) pour les rafraîchir. Nul ne les aurait pour rien au monde subtilisé,. Cette façon de rafraîchir était utilisée dans tous les autres points d’eau de la ville, qui avaient des « piles » (bacs en pierre ou ciment).Ceux qui avaient des puits dans leurs caves y plongeaient les bouteilles dans un seau. Parfois les seaux se décrochaient et restaient au fond, mais pour les récupérer on utilisait un outil avec 4 crochets (tira-potz, prononcer Tira-pous) accroché à une chaîne.
LES SOURCES:
Nous avons déjà énuméré, dans les fontaines-lavoirs, de nombreuses sources : Sarac – Calquières – Pélissière – Delpon – Fontaine de la Ville, mais il en reste beaucoup d’autres, dont certaines ont même un caractère historique comme c’est le cas pour celle de :
SARAC : en effet c’est un document du 14 Juin 1357 qui nous en révèle l’existence :Le Seigneur Bérenger VI (âgé de 25 ans) en fait cadeau à la ville, ou plutôt aux Consuls représentants de la Commune. C’était un gage de bonne entente avec la Commune après des siècles de contestation de droits communaux. Seize années après la transaction de 1341, entre les Syndics et probablement Bérenger VI et la signature en 1357 d’une charte communale approuvée par plus de 7OO électeurs en l’Eglise St Paul, instituant l’administration communale avec 3 Consuls, élus chaque année et non renouvelables.
Mais revenons à ce cadeau, il est précisé :
Don de la fontaine et aqueduc. Chemin de Clermont à Nébian, autorisant la pose d’un greffoulz (griffe) et abreuvages d’eau et amenant par canaux et fistules, conduits vers l’entrée, au portai, proche de la Croix, appelée Bessane, et jusqu’au puits, pour arouzer (arroser) des près, champs, l’eau s’écoulant de ces près et champs devenant propriété du Seigneur, pour l’utilité et la décoration de la res-publica (chose publique). En annexe il était précisé, l’eau de la Coutellerie.
La chose étonnante est, comme nous avons pu le constater récemment que presque tout ce qui est indiqué dans ce document existe encore, ou que tout ou moins on peut en retrouver les traces. La conduite maçonnée, de près de 2 m de haut est encore visible. Elle part de la Fontaine de Sarac (toujours visible), traverse la route, longe jusqu’ à 20m de la descente de l’huilerie, retraverse la route à hauteur de la villa des Sources, monte derrière les bâtiments et chemine, après une dérivation (encore visible) jusqu’au lavoir de la Rue Coutellerie, passe tout près de l’ancienne Ecole des Frères, en bordure de la Ramasse. Et là une dérivation arrivait au Moulin à Huile des Dominicains (aujourd’hui chez Mr Dubois antiquaire, même dénomination), en traversant le lit du Rhonel par une conduite aérienne (toujours visible) et irriguait les jardins potagers (Miche/ Planas et ses héritiers conservaient ce droit d’eau) sur la rive gauche de ce ruisseau.
Aujourd’hui cette source a été cédée par deux municipalités Clermontaises à la Maison Salasc.
Les traces de l’irrigation du lotissement dit Molinier (Quartier de la Gare, entre le Quai Cot Bd et Paul Bert et Avenue Foch, qui autrefois était totalement à destination agricole) étaient visibles, et montraient à quel point l’eau y était abondante et précieuse. Une conduite alimentait le moulin à huile dit de Bouttes, puis plus tard exploité par un frère Viguier, l’autre frère exploitant celui de Rabieux (aujourd’hui emplacement des meubles Boyer).
Source belous : Cette source très abondante (11 litres 20 à la seconde (I)), avait été acquise par la commune de Clermont le 13 Mai 1895. Elle sourdait tout près du lotissement Rovira (La Ramasse), et a été utilisée par les frères Balzer Jean et Nicolas pour leur four à chaux, puis par l’usine de la Baryte, jusqu’en 1936. L’eau excédentaire était recueillie dans un vaste bassin (toujours existant dans la villa des Sources) aménagé en 1895, de 100 m2 de surface, qui alimentait les 4 piles de lavoir et ‘abreuvoir des gendarmes, ainsi que le lavoir de la Route de Nébian (ce lavoir, ouvert à tous, était surtout utilisé par les » bugadières « , ou si vous préférez « les lavandières » (celles de Clermont, pas celles du Portugal) et en particulier celles de l’Hôtel Antoine (dit du Terminus).
Source Lonjon achetée en 1898 par la commune.
Puits des Bories : aménagé en 1900. Installation d’une pompe en 1923.
Source de Fontchaude : Même tènement.
Source de Fontenille : Tènement de la Maladrerie.
Source des Cibiéres ou Civières : (31,30 à La seconde). Elle est signalée au 16e siècle sous le nom de Valat de Gaja (probablement val du Gajo). Construction de bassins-réservoirs en 1901, canalisations refaites en 1930.
Source de la fontaine de THOUROU : (jamais utilisée par la commune, écoulement dans le Rhonel).
En 1866 un projet d’achat par la commune fut élaboré avec les propriétaires Planque, Lugagne, frères Saumade mais resta, semble-t’il, lettre morte, ainsi d’ailleurs que le projet sur le même emplacement de l’établissement d’un abattoir, ce dernier fut édifié au lieu dit « Croix de La Pauze » terrain acheté en 1879 à Mestre.
source de Valombreuse : à près de 7 Km de Clermont, après le Mas de Roujou, en raison des besoins de plus en plus importants en eau, un projet d’utilisation de cette source, réputée comme pouvant alimenter 22 litres seconde (I) est présenté le 29/1 1/1923. Il est adopté par la Municipalité présidée par le Dr Ronzier-Joly. Elle naît à la côte 104, est élevée à la côte 163, près de N.D. du Peyrou, arrive à un nouveau bassin à deux chambres séparées d’une contenance de 898 m3, altitude 148m, près de la Fontaine du Thourou (I).
Dans les années I960, on constata une forte baisse du débit de cette source occasionnant de nombreuses coupures d’eau pour les usagers, on fit venir un puisatier afin de forer en dessous du point de pompage mais malheureusement la source disparut. Denis Escudier intervint aussitôt : on transforma le captage, et on amena un apport de la Dourbie, rivière voisine, cet apport avait un inconvénient en période de pluie lorsque l’eau sortait boueuse du robinet, on étancha la prise d’eau pour pallier à ce grave inconvénient. Dans les années 1990 ce fut la canalisation qui se détériora, et c’est grâce à l’aide de l’apport de l’eau du Pont de l’amour, prêtée par Nébian que l’on put faire face aux besoins. Depuis la canalisation a été réparée mais on a ajouté un apport d’eau important par un puisage dans une nappe près de Ceyras
(I) Indications de Gaston Combarnous, sur l’opuscule publié à l’occasion de l’inauguration du nouveau Régime des Eaux, et de l’Exposition Régionale des Vins Blancs (présidée par Mr le Ministre de l’agriculture le 11 juillet 1926). La source Belous avait été achetée en 1895, mais le 28 Mars 1891 la commune avait acquis l’immeuble Belous pour y installer la Gendarmerie, (aujourd’hui H.LM. et local des ventes de l’Huilerie) à la même époque, ainsi que la Villa des Sources. Et en 1895 on couvrait le réservoir des sources Belous. I lest assez étonnant de constater que la source Thourou n’ait jamais été utilisée alors qu’elle coule à quelques dizaines de mètres du bassin communal
LES PONTS
On trouve mention d’une passerelle au bas de la Rue J.J. Rousseau, il est probable qu’il y en ait eu d’autres, les fréquentes et imposantes crues devaient les emporter souvent. C’est ainsi que le 29/10/1860 tous les ponts furent démolis : le pont du Rhonel menant aux Dominicains (Pénitents), le pont Royal de la Place St Paul, celui de la Coutellerie Neuve (Rue Lamartine), ainsi que des maisons, et l’on déplora la mort de 2 femmes et 2 enfants.Avant la construction des ponts actuels, il est probable que l’on utilisait des Passerelles et parfois des gués à l’intérieur du lit du Rhonel, il est vrai qu’en dehors de la partie haute du quartier de la Coutellerie (dérivé de Costellaria, chemin des coteaux), les habitations sur la rive droite du Rhonel n’existaient pas. Les terrains étaient cultivés en jardins, champs, férragals (plantes fourragères), olivettes et oliveraies, vignes et hernies (incultes). C’est ainsi qu’au XVIIe siècle (1) on dénombre 2.755 sétérés, soit 688 hectares de champs, 165 ha de vignes (23%), 98 ha de vignes et oliviers (14%) – 426 ha d’oliviers soit 62%.
Le plus ancien est ignoré de beaucoup, le Pont du chemin du Peyrou c’est celui qui est tout près de la cave Coopérative, il est sur le tracé de l’antique voie romaine de Nimes à Toulouse, et qui traversait Clermont par la Croix Rouge, la place du Marché, et la Frégère, reliant la plaine au Nord-Ouest du département au Tarn.
On dénombre 17 ponts ou ponceaux :
Le pont de la Lauze ; des Catherinettes ; de Bezerac, pont dit de la Route de Lodève (aujourd’hui Salagou) ; Pont du Génie (construit en 1927) par le bataillon du Génie (56 hommes) commandé par le Capitaine Fulcrand ; Pont des Calquières ; Pont St Paul ; Pont Lamartine ; Pont Gambetta ; Pont Avenue Ronzier Joly 1866 ; Pont de la Gare en 1891 ; le petit Pont de l’Hôpital en 1922 ; et les deux du Pont de chemin de Fer, Pont du Fer à cheval, Pont d’Ancélis (Route de Brignac ) •
Le pont du génie avant la démolition des maisons (haut gauche), le pont le plus ancien de la ville prés de la coopérative (haut droite), le pont des calquieres (ancien lavoir, bas gauche) et le pont de l’amour aujourd’hui à Villeneuvette (bas droite)
Article de Blaise Gallego